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Mescladis e còps de gula
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  • blog dédié aux cultures et langues minorées en général et à l'occitan en particulier. On y adopte une approche à la fois militante et réflexive et, dans tous les cas, résolument critique. Langues d'usage : français, occitan et italien.
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23 août 2010

Livre sur les langues régionales et « potentiel commercial »

idees

Livre sur les langues régionales et « potentiel commercial »

Les éditions parisiennes du Cavalier Bleu, créées en 2000, se sont faites connaître pour une collection de vulgarisation en sciences humaines intitulée Les idées reçues, riche aujourd’hui de plus de 200 titres sur les sujets les plus variés, souvent écrits par de bons spécialistes des questions traitées. Pour donner une idée de la diversité des thèmes traités dans ces petits livres de 128 pages, généralement bien faits, il suffit de citer les derniers titres parus : L’Assemblée nationale (Bernard Accoyer), Les Gitans (Marc Bordigoni), Le Jazz (Julien Delli Fiori), Le Liban (Daniel Meyer), Mythologie de la peopolisation (Jamil Dakhlia). Sont annoncés L’Anarchisme, Le Maghreb, Le Maroc

Le principe de cette collection me paraît très judicieux : ce sont les énoncés des plus courantes idées reçues sur le sujet traité, regroupée sous des rubriques générales, qui structurent chacun des ouvrages et servent de titres aux différents chapitres, de sorte que le savoir est transmis à travers l’analyse et la déconstruction des préjugés, poncifs, idées toutes faites. Cette manière de procéder me semble particulièrement attractive et pédagogique, et conduit à proposer une vision de la connaissance à la fois combative et dialogique, qui conduit d’abord le lecteur à se défier de ce qu’il croit savoir parce qu’il le trouve répété partout.

Ainsi à titre d’exemple, l’ouvrage sur Les Corses est organisé par son auteur, Philippe Franchini, de la façon suivante : Caractère et tradition : « Ils sont machos et vénèrent leur mère. » ; « Ils sont individualistes. » ; « Ils forment une vraie mafia. » ; « En Corse, la loi du silence est sacrée. » ; « Ils sont susceptibles et manquent d'humour. » ; « La culture corse se résume au chant polyphonique. » Société et Economie : « Les Corses n’aiment guère le travail. » ; « Ils sont douaniers, adjudants ou gardiens de prison. » ; « Quand ils ne sont pas fonctionnaires, ils sont gangsters ou patrons de casino. » ; « Le tourisme est la seule richesse de l’île de beauté. » ; « La Corse coûte cher à la France. » Politique et Actualité : « Les Corses ne respectent pas la loi, ne paient pas leurs impôts et font voter les morts. » ; « Les nationalistes sont tous des terroristes. » ; « Ils sont xénophobes et racistes. » ; « Si les Corses veulent l’indépendance, qu’ils la prennent. ».

Je venais de lire l’excellent volume d’Antony Pecqueux sur Le Rap, et outre ceux consacrés aux Corses et aux Gitans, j’avais repéré divers titres qui touchaient aux thématiques de ce blog : La Bretagne, de François de Beaulieu ; La Francophonie, de Claire Tréran ; La Colonisation, de Christelle Tarraud ; La Nation, de Gil Delannoi ; Les Français, de Nelly Mauchamp ; La Laïcité, de Pierre Khan et aussi un ouvrage promotionnel composé de chapitres empruntés aux livres déjà parus (une sorte de best of thématique), intitulé La France : une idée reçue ?

C’est ainsi que l’idée me vint de proposer à l’éditeur d’ajouter à la série Les Langues Régionales, presque étonné de ne le pas trouver dans la liste. Les énoncés des idées reçues sur la question se pressaient déjà en foule à mon esprit : « Les langues régionales sont des patois » ; « Les langues régionales enseignées aujourd’hui sont artificielles » ; « Les langues régionales sont des langues mortes » ; « Les enfants qui parlent les langues régionales parlent mal le français » ; « Les Langues régionales sont imperméables à la modernité » ; « Les langues régionales menacent l’intégrité de la République » ; « Les défenseurs des langues régionales sont passéistes et réactionnaires » ; « Ils se sont compromis avec le régime de Vichy » ; « Ils sont hostiles à la laïcité », « ils sont communautaristes », etc. etc.

          Je fis donc ma proposition en ligne, comme le site de l’éditeur en donne la possibilité. Voici la réponse qui m’a été faite (au moins sais-je gré à la maison de m’avoir répondu) : « Je vous remercie pour l’intérêt que vous portez à notre collection "idées reçues" et pour votre proposition d’un ouvrage sur les « langues régionales ». Malheureusement, le potentiel commercial d’un tel titre nous apparaît trop limité et les ventes donc insuffisantes pour rentabiliser la publication d’un tel ouvrage. Aussi, ne pouvons-nous pas donner une suite favorable à votre proposition. Bien à vous. »

          Cette réponse, je dois dire, ne m’a pas peu surpris, au vu des ouvrages déjà publiés dans la collection en question, consacrés à maints sujets dont rien ne me semble indiquer qu’ils puissent représenter un « potentiel commercial » supérieur à celui que je proposais, comme par exemple, en vrac, L’Australie, L’Allemagne, Les Belges, La Chasse, Les Croisades, L’Épilepsie, Les Harkis, La Graphologie, etc. etc.

          De deux choses l’une, soit cette réponse vise à éconduire poliment un sujet qui gêne, un sujet dont la légitimité n’est pas acquise, ce qui n’est pas exclu (mais je n’y crois guère) ; soit effectivement l’éditrice est convaincue que le titre n’est pas « porteur » et ne se vendra pas (un autre message, suite à une réaction agacée de ma part, évoque un « plantage assuré »). Elle trahit ainsi, à mon avis, sa méconnaissance totale de l’intérêt suscité par le sujet, dont témoigne entre autres choses et outre les statistiques de lecture du présent blog, le nombre d’interventions sur les forums des journaux dès que (c’est-à-dire en effet assez rarement) le sujet est discuté et cette ignorance, à mon sens, n’est pas étrangère au lieu d’implantation de la maison d’édition (Paris, comme je l'ai dit). Mais cette ignorance est révélatrice du fait que, en effet, vu de Paris, dans les milieux universitaires et « lettrés », ce sujet n’intéresse personne et n’est donc pas considéré comme susceptible d’intéresser qui ce soit dans le vaste public francophone. Voilà des idées reçues à rajouter aux autres sur le sujet : « les langues régionales n’intéressent personne », « les langues régionales ne représentent aucun potentiel commercial »…

          C’est la situation objective que je rencontre tous les jours dans la capitale : d’une part, en effet, l’absence de légitimité académique du sujet, de l’autre son caractère incongru et futile. Il en sera ainsi tant que nous ne parviendrons pas à faire naître une discussion publique sur ces questions au niveau national, c’est-à-dire, bien sûr, relayée par les médias parisiens. Lorsque ce jour viendra, s’il vient, ce sont les éditeurs qui nous écrirons pour nous proposer de plancher sur le sujet, mais en attendant, nous continuerons à passer au mieux pour de ridicules fantoches.

Jean-Pierre Cavaillé

ideesrecuesmanagement

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Commentaires
A
"Je vais défendre Weil"<br /> <br /> Défendre un texte qui fait l'éloge du colonialisme et de l'assimilationisme ! et qui en prend à son aise avec la réalité historique !<br /> <br /> "ph. Martel : "Par contre, il y a un problème avec beaucoup (trop) de profs d'espagnol français (et d'étudiants) qui transposent mécaniquement leur monolinguisme français à une situation espagnole différente, et s'indignent qu'on leur parle autre chose que ce qu'ils ont eu tant de mal apprendre." "<br /> <br /> Les profs d'espagnol ne sont probablement que le cas particulier des profs français en général qui sont très loin des majoritairement d'ardents défenseurs des langues minoritaires, bien au contraire.<br /> <br /> On peut certainement trouver parmi eux les plus hostiles a l'égard de ces langues, entre autre pour des raisons idéologiques.<br /> <br /> Une illustration en est donnée une fois de plus par le Monde dans un "point de vue" de l'une des "Maîtresse-à-pensées" du moment :<br /> <br /> http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/09/03/ecole-silence-on-privatise_1406334_3232.html<br /> <br /> Ecole : silence, on privatise...<br /> <br /> "Il ne s'agit pas seulement de faire des économies, mais d'un programme idéologique : faciliter l'évasion scolaire en direction du privé.<br /> <br /> Il existe aujourd'hui 8 200 établissements catholiques sous contrat (soit 1 961 037 élèves), auxquels il faut ajouter 256 établissements juifs (38 000), huit protestants (2 760), 82 établissements bretons catholiques (4 241), 44 écoles bretonnes Diwan (3 076), 26 écoles basques (2 508), 50 occitanes (1 627) et huit catalanes (6 000). La France est divisée, moins citoyenne, mais ce n'est rien au regard de ce qu'on lui prépare."<br /> <br /> Le "point de vue" se termine par : "la tombe de l'esprit républicain."<br /> <br /> Heureusement qu'il reste en france de "bons" citoyens, de "bons" républicains, autrement dit, de "bons" français, comme Patrick Weil et C. F.
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J
Une solution pour faire accepter le projet par le Cavalier Bleu serait peut-être de proposer un ouvrage sur les langues minoritaires, disons, en Europe. Et d'y faire figurer les "langues de France" en bonne place ? En montrant que la problématique en est une en GB, en Espagne, en Italie, que dans chaque contexte on observe des réactions différentes, et que dans le contexte européen la France occupe une place à part, qui génère un certain nombre de comportements (mais qu'on retrouve aussi ailleurs : un des grands phantasmes des anglais, c'est de penser que les gallois font exprès de passer au gallois dès lors qu'ils (les anglais) entrent dans un pub. il ne leur viendrait pas à l'idée que les gens du pub aient pu parler gallois avant. De toute manière, ceci tient plus de la légende urbaine que d'autre chose... l'histoire est racontée de manière tellement similaire par tellement de gens...).
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S
ph. Martel : "Par contre, il y a un problème avec beaucoup (trop) de profs d'espagnol français (et d'étudiants) qui transposent mécaniquement leur monolinguisme français à une situation espagnole différente, et s'indignent qu'on leur parle autre chose que ce qu'ils ont eu tant de mal apprendre."<br /> <br /> Oui je l'ai constaté quelques fois... et s'ils "tolèrent" le folklore breton, le défilé inter-celtique de Lorient, les vieux en costumes-sabots qui dansent sur la scène du village la bourrée limousino-auvergnate en huchant à tue-tête, ils ont bien du mal, en général, avec l'autonomie catalane ou basque (des droits politiques, vous vous rendez compte?) et l'omniprésence, voire la supériorité des patois catalans, basques, galiciens etc dans les régions d'Espagne...
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R
Oui les occitans ont bien accueilli les étrangers, surtout le 17 août 1893 à Aigues-Mortes. Braves occitans !
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M
A gascon for ever<br /> <br /> Sauf que les polonais de La Sala en 1960 parlaient occitan, euh excusez moi le patois (qui n'a rien a voir avec le patois gascon, ) de La Sala , que les espagnols gantiers à Millau , les catalans parlaient eux aussi occitan , excumez-oi décidement , ( j'ai un côté mièvre maman) encore patoisant universaliste limite felibrejada . J'ai même connu un gascon heureux dans mon village. Et ceux que je connais sont de bons vivants, palombe, pesca, caça, dinette dans les arbres. Etes vous vraiment contre cette image? que je sache le parisien, le breton, l'alsacien, le picard ne montent pas spontanément dans les pins. Il y a encore pas mal d'endroits où l'on sent pulser le coeur de l'Occitanie (pardon des Communautés d'agglomerations d'appelations d'origine contrôlées par Gascon justement ) <br /> Mièvrerie , c'était pour le 5ème degré. <br /> Je connais la réponse. Ce pays a été denaturé en profondeur . Mais il subsiste encore quelques petites choses entre le domaine rural et les villes moyennes.<br /> Je posais la question pour rire, comme cette mère qui telephone à la radio pour savoir si c'est grave. Que son enfant avale la cuillère avec le sirop.<br /> Cela dit, l'Occitanie ou la France a accueilli la majorité des pieds noirs dans le sud , mal OK ( eux sont arrivés en "France" mal , ils se branlaient tout a fait des troubadours, les harkis, mal, qui cherchent encore le chemin de la mosquée, les italiens mal qui devaient revitaliser le sud profond agricole, les espagnols mal que la France a parqué pour éviter la contagion anarcho-communiste, les comoriens mal, les turcs encore plus mal, les marocains, les tunisiens mal je ne sais plus pourquoi. Mais c'est le génie de la France , de ne pas donner de pensions . <br /> L'occitan peut-être différent . Nous n'en savons rien. En attendant il subit l'hyper centralisme jacobin . Vous avez raison , l'occitan , pardon l'être-néantisé( l'appelation vous convient-elle?) qui vegète au sud d'un axe Nantes Grenoble n'est pas meilleur que les autres, surtout pas que le français bobo qui vient nous voler le miel de nos ruches dans nos sillons ensanglantés. Hitler ne s'y était pas trompé.<br /> Et franchement je persiste à croire que si je devais être "accueilli" , un jour j'aimerai à temps que faire , que ce soit en Occitanie, à commencer par la Gascogne (qui n'est pas un pays je vous l'accorde). Pour avoir essayé ailleurs. <br /> Maintenant comme disait mon chef du personnel à Paris , monsieur il faut choisir "le bistèc (Paris) o le solèlh, l'Occitanie(zut ). <br /> Maintenant, c'est certain, avec tous les étrangers l'accueil sera pire forcément, enfin il sera comme ailleurs. Une place dans l'avion , e bonjour Bucarest, Oran, o Ndjamena...
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