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Mescladis e còps de gula
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  • blog dédié aux cultures et langues minorées en général et à l'occitan en particulier. On y adopte une approche à la fois militante et réflexive et, dans tous les cas, résolument critique. Langues d'usage : français, occitan et italien.
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16 juillet 2008

Langues régionales : L’État se défausse

 

 

Je viens de recevoir ce communiqué de presse de François Marc, sénateur du Finistère (PS), l'un des rares à s'être opposé à la levée de bouclier jacobine du Sénat le 18 juin dernier. Il réagit au vote de l'Assemblée ce 9 juillet visant à inscrire la patrimonialisation des langues régionales à l'article 75 de la Constitution, concernant les collectivités locales (et non donc la communauté nationale). Il me semble intéressant de le publier car cette modification constitutionnelle en effet, si elle a lieu, paraît désengager définitivement l'Etat de toute action en faveur des langues minorées et entériner une conception exclusivement territoriale de la question linguistique, en contradiction explicite avec les (mauvaises) raisons avancées pour refuser la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires et régionales.

JP C

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Langues régionales : L’État se défausse

 

La question des langues régionales et des moyens que l’ÉTAT consacre à ce « patrimoine » est régulièrement objet de débats en France. La discussion parlementaire récente sur une éventuelle inscription dans la Constitution a-t-elle révélé une claire intention de l’ÉTAT d’en faire davantage à l’avenir ?

Rien n’est moins sûr.

Le 29 janvier 2008, j’avais une nouvelle fois, avec mes collègues bretons (Yolande BOYER, Odette HERVIAUX et Louis LE PENSEC), défendu sans succès au Sénat un amendement constitutionnel visant à inscrire que « dans le respect du 1er alinéa de l’article 2, la République française peut ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l’Europe ».

Déjà manifestée à cette occasion, l’opposition du gouvernement à cette ratification a clairement été confirmée ces derniers jours au Parlement.

De ce point de vue, les choses sont donc tranchées : C’est NON !

Pour autant, certains avaient cru pouvoir penser que l’inscription à l’article 1 ou 2 de la Constitution d’une mention des langues régionales serait de nature à ouvrir de nouvelles possibilités d’intervention de l’État.

L’inscription à l’article 1 que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » aurait-elle été créatrice de droits nouveaux ? Beaucoup en étaient convaincus, même si la formulation proposée se révélait être avant tout un constat et non un engagement….

Mais en définitive, ce questionnement n’a aujourd’hui plus lieu d’être. Car en faisant le choix de faire mention des langues régionales non à l’article 1 ou 2 de la Constitution mais à l’article 75-1 au sein du titre12 portant sur l’action « des collectivités territoriales », le gouvernement et sa majorité ont levé toute ambiguïté sur leur peu de volonté d’amplifier l’action de l’ÉTAT en faveur des langues régionales.

On ne peut manquer de rappeler au passage que Régions, départements et communes consacrent déjà des moyens financiers très conséquents aux langues régionales : Ainsi, la langue bretonne bénéficie annuellement de plus de 6 millions d’euros de la Région Bretagne, de 2,2 millions d’euros du département du Finistère, sans oublier les multiples contributions des communes !

L’article 75-1 proposé aujourd’hui ne fait donc que légitimer les actions significatives déjà conduites dans les territoires.

 

Mais on peut au surplus estimer que l’adhésion du gouvernement à cet article sous-tend pour l’avenir une ligne très restrictive : En somme l’État ne serait pas opposé à ce que le patrimoine linguistique régional soit préservé mais il n’apporterait pour cela aucun moyen financier supplémentaire, laissant aux collectivités la liberté d’agir et en conséquence de lever les impôts nécessaires à ces actions décentralisées.

La question peut dès lors être légitimement posée : L’article 75-1 n’est-il pas générateur d’un jeu de dupes ? Pas de signature de la Charte européenne ; pas de création de droits nouveaux ; pas de moyens financiers supplémentaires de l’État … L’inscription dans la Constitution, si elle peut dans son principe être regardée avec sympathie, n’en est pas moins par le choix de l’article 75 une sorte d’invitation à bon compte à se tourner encore un peu plus vers les moyens financiers des collectivités, dans la droite ligne des transferts de charges de la décentralisation Raffarin.

Incontestablement on est loin du « gagnant/gagnant » !

Sénateur François MARC

2, rue de

Mail : Francois.MARC1@wanadoo.fr

Tél. 02.98.20.48.70

la Mairie

29 800

LA ROCHE-MAURICE

 

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Commentaires
P
Avec retard, car je n'avais pas vu votre réponse.<br /> -Je voudrais bien pouvoir croire comme vous que le problème n'est pas financier, mais seulement lié à une sorte de choix philosophique entre les réions et l'Etat "jacobin". Je précise que je n'ai aucune sympathie pour ce dernier en soi (en dehors du fait tout simple que j'ai du mal à imaginer en jacobins Sarkozy, Hortefeux,la calotine Boutin, le chouan Fillon, le facho à peine repenti Devedjian et autres). Ceci étant, je n'envisage pas avec la même désinvolture que vous la question des moyens. Si l'Etat transfère les charges sans faire suivre les recettes (et si vous lisez les journaux vous saurez que c'est ce qu'il fait avec volupté (pour punir tous ces sagouins qui ont voté à gauche)), il est clair que les régions auront de plus en plus de mal à financer l'entretien du réseau ferré, la politique sociale, les lycées et Dieu sait quoi encore. Alors, je vais vous dire, les langues régionales, dans le tableau, hein ? le budget culture n'est déjà pas énorme, et si eles doivent y privilégier quelque chose, ce sera le patrimoine bâti et les enièmes grands festivals de jazz (combine en Mdi yrénées ? 4 ? 5 ?o)ou de Dieu sait quoi ousque le parisien en goguette il vient enrichir sa culture, pas des occitaneries dont ces gens (à part quelques élus qui sont nos amis)sont persuadés qu'elles n'intéressent que trois clampins. Je crois savoir que le fameux esquema Midi Pyrénées dont vous parlez sera financé à moyens constants, sans augmentation d'une année sur l'autre sinon pour suivre de loin l'inflation : c'est un signe, non ? Quant à la fiscalité et aux marges de manoeuvre dont disposent en la matière les régions, c'est justement là-dessus que compte le gouvernement, avec l'espoir que non seulement ça lui évitera à lui-même des dépenses, mas qu'en plus ça indisposera suffisamment le contribuable pour que la fis prochaine il vote pour la droite. C'est aussi simple que ça. Et les grandes envolées sur les régions qui que dont, et la nécessaire délivrance du tabou de l'Etat, face à ces basses considérations politico-friquesques, je vais vous dire, c'est du pipeau agreste.<br /> J'ajoute que comme Sicre, avec les nuances nécessaires, je pense que notre culture d'oc a des choses à dire à tous les Français (et au delà !, pas seulement aux zeureux zabitants de nos provinces, et que l'enjeu c'est justement de ne pas nous laisser enfermer dans des cadres locaux façon réserve navajo. Je continue donc à penser que c'est à nous de créer le rapport de force (avec l'aide des régiosn, soit) pour imposer à l'Etat bourgeois et centraliste la fin de son mépris pour les langues et les cultures des gros ploucs que nous sommes aux yeux des petits neuilléens qui l'occupent aujourd'hui.
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L
Vous vous trompez si vous croyez que l'enjeu principal des transferts de compétence entre l'Etat et les collectivités locales est financier. Aucun transfert ne s'est fait à recettes égales, et pourtant les finances des collectivités sont en meilleur point que celles de l'Etat... C'est parce que les collectivités locales ont (encore) une marge en matière de fiscalité que l'Etat n'a plus.<br /> Le monde réel, ce n'est pas plus celui de Sarkozy que ça n'aurait été celui de Royal, c'est celui d'un Etat qui s'est bâti sur le monopole du français. Le blocage de cet Etat envers les langues minoritaires n'a jamais été levé par la gauche, mais vous pouvez quand même croire qu'elle le fera un jour.<br /> Ce qui fait mal au coeur, c'est le blocage de nombreux militants occitanistes sur leur rêve d'un Etat français qui pourrait changer, devenir enfin "gentil". Ils sont tellements angoissés à l'idée de passer pour des anti-républicains qu'ils préfèrent que leur langue y passe plutôt que d'y renoncer.<br /> Pourtant, l'urgence impose de devenir lucide, et vite :<br /> D'un côté, un Etat qui parie sur la mort des langues, que ce soit au niveau de la plupart des élus nationaux qui s'en foutent, ou que ce soit au niveau d'un appareil administratif dont la résistance est énorme (méritant le terme d'"Etat profond");<br /> De l'autre, des régions à qui la tutelle de l'Etat pèse de plus en plus, et où on sent poindre un désir d'asseoir une légitimité populaire spécifique : culturelle, lingüistique peut-être... On peut rêver, en tout cas je vous invite à aller consulter "l'esquèma regional de desvolopament de l'occitan" sur le site de la Région Midi-Pyrénées.<br /> En tout cas, d'autres font ce pari : c'est le cas au Pays Basque (avec la proposition d'Eurorégion) ou en Bretagne. A suivre...
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P
IL faudra donc être très vigilant face à la loi que promet cette pauvre Albanel, car c'est vers les régions qu'elle risque de se tourner, puisque c'est dans le chapitre collectivités locales que les langues régionales sont mentionnées. Et ceux qui se contentent à bon compte de dénoncer l'Etat jacobin en espérant que les régions se substitueront à lui vont au devant de graves désillusions :'Etat veut bien transférer des charges aux régions (il le fait depuis des années), mais pas leur transférer les recettes qui vont avec. Bienvenue dans le monde réel, celui de Sarkozy !
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P
Un peu d'histoire de la République ne peut nuire à voir les choses dans toute leur perspective, une perspective qui vient de très loin, au sujet des langues régionales:<br /> Le premier point concerne la "politique d'éradication" menée par les gouvernements de la III° République. C'est un sujet habituellement tabou, la République n'ayant jamais eu une très grande capacité à faire une auto-critique sur ses propres dérapages éventuels (la guerre d'Algérie pourrait ici, toutes choses égales par ailleurs, figurer en gage d'archétype).<br /> <br /> Il y a eu de manière répétée des instructions des "Ministres de l'Instruction Publique" successifs de la III° République, envoyées aux Recteurs d'Académie, leur demandant de parvenir à "l'éradication" des langues régionales, dans les différentes régions concernées.<br /> La mise en oeuvre n'était pas toujours identique au niveau local mais un très grand nombre d'instituteurs se montraient particulièrement zélés (j'y reviendrai infra), dans le relais de cette politique gouvernementale décidée au niveau national.<br /> Il est vrai que l'ont sortait tout juste, lors de l'installation de la III° République en 1870, de la débâcle militaire du Second empire et qu'on n'a dû alors le rétablissement de la République qu'au refus intraitable et obstiné du Cte de Chambord, dernier Bourbon prétendant au trône, d'accepter le drapeau tricolore. Rappelons-nous que Thiers, Mac Mahon élu Président de la République, et beaucoup d'autres d'une assemblée dominée par les monarchistes qui voulaient alors rétablir la royauté, lui offraient le trône sur lequel il serait monté sans coup férir, s'il avait eu un esprit moins rigide et passéiste.<br /> Pour combien de temps? Ce serait une autre question, mais s'il s'était agi d'un esprit plus ouvert et moderne à la Juan-Carlos d'Espagne, acquis et attaché aux valeurs des Lumières, sans doute pour longtemps.<br /> <br /> La jeune République était fragile et elle voyait d'un très mauvais oeil les langues régionales perçues à tort ou à raison comme un ferment de régionalisme associé à un rappel la monarchie (cf. l'exécution à la guillotine des Girondins, Républicains fédéralistes et régionalistes, par Robespierre et les Montagnards jacobins parisiens, pendant la révolution, en 1792) et surtout perçue comme une menace directe de division contre l'unité de la République (ce qui subsiste, c'est remarquable, dans l'argumentation complaisante de certains aujourd'hui sous la forme de l'argument de la "balkanisation").<br /> Peut-être qu'une touche paranoïaque est-elle là inconsciemment à l'ouvre depuis longtemps, depuis les premiers temps de la République révolutionnaire menacée dès ses débuts par l'Europe des monarchies coalisées et par le soulèvement notamment des régions de l'ouest, contre le tout nouveau régime?<br /> Un autre point important à souligner est que l'on avait à l'époque vers 1870, aucune notion des possibilités d'une éducation bilingue, voire trilingue (langue nationale, langue régionale et langue étrangère: anglais, allemand, espagnol ou italien par exemple). Alors qu'on sait aujourd'hui, les meilleurs chercheurs et linguistes en attestent, que cette éducation, si elle est bien conduite, je veux dire avec les moyens qu'elle suppose, permet non seulement une ouverture d'esprit aux autres et au monde plus grande de ceux qui peuvent en bénéficier, mais que, si elle n'empêche aucunement une bonne maîtrise de la langue nationale et de son écriture, elle est de plus extrêmement propice à l'apprentissage ensuite facilité de plusieurs autres langues étrangères.<br /> Ce n'est peut-être pas un hasard si les français sont hélas connus pour leur niveau médiocre en langues étrangères, la politique anti-langues régionales alliée à celle d'un enseignement mono-lingue privilégiant exclusivement l'apprentissage du français sans insister suffisamment celui des langues étrangères pendant plus d'un siècle jusqu'à il y a peu, n'y sont peut-être pas pour rien? C'est peut-être une des racines inconscientes (donc complètement inaperçue) de ce difficile problème collectif français.<br /> <br /> La France, patrie des droits de l'homme et du citoyen, la République, n'aime pas beaucoup disais-je supra la "repentance" ou ce qui ressemble a un mea culpa sur sa conduite en matière de droits de l'homme (cf. la façon dont est habituellement traitée la période de la Terreur révolutionnaire dans les programmes des manuels scolaires d'histoire). Elle est par contre assez championne, il faut le reconnaître, pour donner la leçon aux autres nations y compris en matière de diversité culturelle et de respect de leurs minorités culturelles et aussi linguistiques (cf. les Inuits au Groenland ou autres etc.). Cela pourrait paraître un comble, mais c'est en fait assez logique car le: "faites ce que je dis et pas ce que je fais", caractérise fréquemment la posture de celui qui ne veut pas regarder le réel de son histoire nationale en face, sans fard, ce qui n'est certes pas toujours agréable. Aussi est-il remarquable que l'éducation que nous fournit l'école de la République est proprement amnésique et muette sur le sujet des langues régionales et surtout de cette politique d'éradication menée pendant 70 ans jusqu'en 1940 où ce furent des brimades, des humiliations morales et physiques jusqu'aux châtiments corporels répétés qui étaient employés par la République sur une partie de ses enfants, pour parvenir par tous les moyens à ses fins. Violence assez totalitaire tant dans l'esprit que dans la pratique faisant penser à des procédés de régimes de sinistre mémoire et irrespect flagrant de la diversité culturelle et de l'altérité hélas..! Mais là, on franchit à nouveau la ligne rouge, cela est politiquement incorrect à rappeler, bien que ce soit la triste réalité de ce qui s'est passé.<br /> A décharge est-il important de souligner qu'à l'époque les châtiments corporels envers les enfants étaient communément admis dans l'éducation, tout comme dans un tout autre domaine était aussi tout autant admis le colonialisme en matière de politique nationale par exemple. Mais cela ne réduit pas les conséquences sur plusieurs générations des traumatismes durablement inscrits ainsi. Qui n'a pas connu dans sa famille dans les régions concernées, qui un grand père, qui une arrière-grand-mère envahis par un véritable sentiment de honte intense à l'idée de devoir parler sa langue régionale, perçue et définitivement intégrée au psychisme comme quelque chose de sale, de rabaissant ou d'humiliant?..<br /> <br /> Peut-être que la façon dont est traité du sujet des langues régionales est-elle la meilleure illustration de ce que j'avance ici de ce formatage inconscient auquel on a abouti par le silence, l'amnésie et une forme d'autisme de l'enseignement de l'histoire nationale par l'école de la République, mené depuis si longtemps. C'est vrai en particulier, mais pas seulement, sur le sujet des langues régionales et sur le regard dépréciatif que l'on peut voir porté le cas échéant sur elles notamment en les qualifiant de "dialectes" ou pire de "patois" (cf. infra), dans un "bien penser collectif" commun assez intouchable, l'"arriéré" le disputant au "ringard" ou au "plouc" dans les étiquettes dont elles sont affublées, quand on les entend quelques fois brocardées. Rappelons à titre de simple exemple que la langue d'Oc (occitan) est une langue de grande culture, c'était rien moins que la langue des troubadours du moyen âge, ceux de l'Europe entière de la Scandinavie à la Sicile, une sorte d'anglais poético-littéraire de l'époque d'une rare richesse, plus littéraire encore que peut l'être le français aujourd'hui. A l'époque ou les chevaliers de langue d'Oïl de la moitié nord de la France signaient d'une croix, ne sachant pas écrire, les comtes de Toulouse ne s'exprimaient-ils pas, eux, en langue occitane, en vers? Mais qui le dit à l'école aux enfants actuellement, qui leur en parle?<br /> <br /> A titre d'illustration de ce qui se vivait en particulier dans les écoles sous la III° République, deux exemples: <br /> <br /> - en Bretagne on lisait: "Défense de cracher par terre et de parler breton" dans les lieux publics et les écoles et on attachait un sabot pendant toute une journée au cou de l'enfant ayant été surpris par le maître d'école à prononcer ne serait-ce qu'un seul mot dans sa langue familiale et régionale. On imagine les dégâts de semblable méthode.<br /> Point n'est besoin d'être grand analyste pour apercevoir l'ampleur du trauma psychique vécu par l'enfant, ainsi devenu l'objet de dérision de tous ses camarades pendant toute une journée et sa souffrance morale alliée à un sentiment de honte extrême..<br /> - en Languedoc et dans toute l'Occitanie (soit 32 départements du sud de la France de langue d'Oc): dans certains villages l'enfant surpris était amené à s'agenouiller les bras en croix sur l'estrade pendant le temps que le maître le voulait, sur une règle en fer, sous les quolibets suscités de ses petits ou petites camarades. D'autres, décidément très ingénieux dans leur zèle, avaient mis au point le système particulièrement pervers du "témoin", au sens de celui des courses de relais. Le premier enfant surpris se voyait remettre par l'instituteur le "témoin" et il lui incombait d'espionner, toute la journée le cas échéant, ses petits ou petites camarades pour le repasser dès que l'un ou l'une laissait échapper par mégarde, malgré la menace de l'interdit qui pesait constamment, un mot ou une expression dans sa langue familiale et régionale. Et pourquoi fallait-il qu'il soit si attentif, mis en situation de délation des ses camarades? Parce que le malheureux enfant qui le soir, à la fin de la journée, était possesseur de ce "témoin" était châtié en public, à la main, voire à la règle et même hélas parfois chez certains instituteurs les plus sadiques au fouet, devant toute la classe, pour faire un bonne leçon à tous. Il est sûr que la leçon qui se voulait "inoubliable" devait en effet être inscrite et pour longtemps dans les mémoires et l'inconscient des petits et petites et, partant, dans la mémoire collective des populations des régions concernées.<br /> A l'inverse il est vrai que certains instituteurs courageux n'appliquaient pas, quels que soient les risques qu'ils prenaient ainsi pour leur carrière, cette politique.<br /> Afin de ne pas allonger mon propos, je n'ajouterai pas d'autres exemples qui, nombreux, seraient tout aussi saisissants et éloquents. Ceux-ci ne suffisent-ils pas amplement déjà?<br /> Il est à noter que les maîtres d'école comme les maires et autres représentants des différentes Institutions menaient parallèlement une active politique de sensibilisation des mères de famille, basée sur l'argument central que si elles continuaient à parler à leurs enfants la langue (d'ailleurs systématiquement ravalée au rang de "patois", expression employée à dessein bien que pourtant absolument impropre puisqu'uniquement idoine pour les parlers issus du français, ce qui n'est le cas d'aucune des langues régionales de France qui via le roman médiéval dérivent directement du latin pour certaines (catalan, occitan, corse) ou sont d'une tout autre origine comme le breton, le basque, le lorrain, l'alsacien le flamand etc.) elles feraient de leurs filles ou de leur fils des "ratés" sans avenir qui ne pourraient jamais réussir dans la vie, ou qui resteraient des "ploucs".<br /> <br /> Il y eu au moment de la signature de la Charte européenne des langues régionales par le gouvernement de la République, une brève ouverture qui s'était, jusqu'au débat récent sur l'amendement constitutionnel, bien vite refermée. Le Ministre de l'Éducation Nationale d'alors, Jack Lang, avait décidé de l'intégration des écoles bretonnes Diwan dans le Service public de l'éducation, entraînant une levée de bouclier sans précédent des parangons de l'unité de la République "menacée", République jacobine s'entend (cf. les réactions de J.P. Chevènement, M. Charasse notamment et de bien d'autres) ayant abouti, suite à une action menée devant le Conseil d'État à l'annulation pure et simple de la décision du Ministre qui dût reculer, rappelons-le nous quand même ce n'est pas rien, la décision du Juge Administratif suprême s'imposant bien évidemment à lui. Le Ministre avait eu pour la première et unique fois jusqu'à ce jour dans l'histoire de la République, des paroles très fortes et courageuses de reconnaissance du tort causé aux enfants de France des régions concernées par cette politique d'éradication des langues régionales (qualifiant d'indignes ses méthodes passées), prise de position que certains ne lui ont d'ailleurs jamais pardonnée. <br /> <br /> Il est vrai que nos langues de France sont moribondes (voire mortes) en ce péril extrême où elles ont été mises par la politique menée si longtemps et qui, c'est un fait, s'est avérée très efficace, puisqu'elle a dramatiquement et fort bien réussi en un siècle, à la quasi disparition de leur pratique et de leur usage dans la vie courante.<br /> Le premier véhicule de la culture et de "la diversité culturelle" dont on célébrait la journée récemment est, d'abord la langue. L''émotion impressionnante ressentie par les habitants du Nord, du Pas de calais et de la Picardie dans les retrouvailles qu'ils ont pu faire avec leur langue picarde-chti à l'occasion de la sortie du film "Bienvenue chez les Chtis" n'en est-elle pas un magnifique exemple et témoignage? Elle a même raisonné pour 20 millions de spectateurs de toutes régions. N'est-ce pas un signe qu'un manque existe chez les français dans cette amnésie forcée que la politique d'éradication linguistique délibérée et systématisée des langues régionales, menée pendant 70 ans par les gouvernements de la III° république a causé?<br /> <br /> Le Président de la République lui-même, pourtant peu suspect de sympathie envers les langues régionales (dont il s'était dit hostile à leur enseignement pendant la campagne présidentielle), ne s'y est pourtant pas trompé, lui qui vient de faire le réalisateur de "Bienvenue chez les Chtis", Dany Boon, chevalier de la Légion d'Honneur ce 14 juillet à l'Élysée..<br /> <br /> Ne faudrait-il pas enfin sortir d'une vision jacobine de la culture française (à laquelle nous sommes restés collés depuis Robespierre, Napoléon et la III° République tout spécialement en matière linguistique!)? Où y a-t-il eu "balkanisation" en Europe chez tous nos voisins qui ont ratifié et appliquent la Charte? Quand renoncera-t-on à agiter ces épouvantails aussi caricaturaux que risibles?<br /> <br /> J'ai conscience d'avoir été long, mais je pense que cet échange peut faciliter un travail de mémoire qu'il faudra pourtant bien que la République arrive à faire un jour, peut-être stimulée par l'Europe et nos voisins tant Espagnols qu'Italiens ou Allemands et même Anglais (sans parler de nos amis Québécois) qui n'ont pas, eux, ce qu'ils disent clairement et unanimement à ce sujet être pour les Français: "un problème"..!
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L
Mais croyez-vous que l'Etat français (la République si vous préférez) puisse faire mieux que ça ? L'Etat peut distribuer quelques subventions, donner à l'occitan une petite place d'option au Bac, accorder quelques postes d'enseignants. Mais il ne peut pas mettre en place, pour l'occitan et les autres, une véritable politique. L'Etat ne peut pas renoncer à combattre pour la suprématie du français puisque c'est comme ça qu'il s'est créé. Il y a là un blocage essentiel, une incapacité liée à sa nature profondément centralisatrice. <br /> La seule chose qu'on peut lui demander, c'est de se retirer de la course en laissant juridiquement la place à d'autres, notamment en matière d'enseignement. Et pourquoi pas aux régions ? Et pourquoi pas dans le cadre du principe de subsidiarité qui figure dans la constitution, pas loin de l'article 75 justement ? Et pourquoi pas dans le cadre d'une loi d'expérimentation ?<br /> Etes vous, militants occitanistes ou autres, si compexés que vous ayez toujours besoin de faire des courbettes à cette foutue République ? Pourquoi refuser d'aller au bout de la décentralisation ? Quel est le risque pour nous ?
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